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Texte à méditer :  Aucune philosophie n'a jamais pu mettre fin à la philosophie et pourtant c'est là le voeu secret de toute philosophie.   Georges Gusdorf
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Hors des sentiers battus
L'évolution du concept de vérité

  "Dans une civilisation scientifique, l'idée de Vérité appelle aussitôt celles d'objectivité, de communicabilité, d'unité. Pour nous, la vérité se définit à deux niveaux : conformité à des principes logiques d'une part, conformité au réel d'autre part, et par là elle est inséparable des idées de démonstration, de vérification, d'expérimentation. Parmi les notions que véhicule le sens commun, la vérité est sans doute une de celles qui paraissent avoir toujours existé, n'avoir subi aucun changement, une de celles aussi qui paraissent relativement simples. Cependant il suffit de songer que l'expérimentation, par exemple, qui soutient notre image du vrai, n'est devenue une exigence que dans une société où elle était une technique traditionnelle, c'est-à-dire dans une société où la physique et la chimie ont conquis une place importante. On peut donc se demander si la vérité en tant que catégorie mentale n'est pas solidaire de tout un système de pensée, si elle n'est pas solidaire aussi de la vie matérielle et de la vie sociale. Les Indo-Iraniens ont un mot que l'on traduit communément par Vérité : Rta. Mais Rta, c'est aussi la prière liturgique, la puissance qui assure le retour des aurores, l'ordre établi par le culte des dieux, le droit, bref un ensemble de valeurs qui font éclater notre image de la vérité. Le simple cède la place au complexe et à un complexe diversement organisé."

 

Marcel Detienne, Les Maîtres de Vérité dans la Grèce archaïque, 1967, Le Livre de Poche, 2006, p. 51-52.



  "Car, chez les poètes grecs du VIe siècle encore, le discours vrai – au sens fort et valorisé du mot – le discours vrai pour lequel on avait respect et terreur, celui auquel il fallait bien se soumettre, parce qu'il régnait, c'était le discours prononcé par qui de droit et selon le rituel requis ; c'était le discours qui disait la justice et attribuait à chacun sa part ; c'était le discours qui, prophétisant l'avenir, non seulement annonçait ce qui allait se passer, mais contribuait à sa réalisation, emportait avec soi l'adhésion des hommes et se tramait ainsi avec le destin. Or voilà qu'un siècle plus tard la vérité la plus haute ne résidait plus déjà dans ce qu'était le discours ou dans ce qu'il faisait, elle résidait en ce qu'il disait : un jour est venu où la vérité s'est déplacée de l'acte ritualisé, efficace, et juste, d'énonciation, vers l'énoncé lui-même : vers son sens, sa forme, son objet, son rapport à sa référence. Entre Hésiode et Platon un certain partage s'est établi, séparant le discours vrai et le discours faux ; partage nouveau puisque désormais le discours vrai n'est plus le discours précieux et désirable, puisque ce n'est plus le discours lié à l'exercice du pouvoir. Le sophiste est chassé.
  Ce partage historique a sans doute donné sa forme générale à notre volonté de savoir. Mais il n'a pas cessé pourtant de se déplacer : les grandes mutations scientifiques peuvent peut-être se lire parfois comme les conséquences d'une découverte, mais elles peuvent se lire aussi comme l'apparition de formes nouvelles dans la volonté de vérité."

 

Michel Foucault, L'Ordre du discours, 1970, Éd. Gallimard, 1971, p. 16-18.
 

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Date de création : 15/09/2014 @ 17:18
Dernière modification : 08/12/2014 @ 10:24
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