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Texte à méditer :  Je vois le bien, je l'approuve, et je fais le mal.  Ovide
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Hors des sentiers battus
Vivre ensemble dans un même monde

  "L'hospitalité […] signifie le droit pour l'étranger, à son arrivée sur le territoire d'un autre, de ne pas être traité par lui en ennemi. On peut le renvoyer, si cela n'implique pas sa perte, mais aussi longtemps qu'il se tient paisiblement à sa place, on ne peut pas l'aborder en ennemi. L'étranger ne peut pas prétendre à un droit de résidence (cela exigerait un traité particulier de bienfaisance qui ferait de lui, pour un certain temps, un habitant du foyer) mais à un droit de visite : ce droit, dû à tous les hommes, est celui de se proposer à la société, en vertu du droit de la commune possession de la surface de la terre, sur laquelle, puisqu'elle est sphérique, ils ne peuvent se disperser à l'infini, mais doivent finalement se supporter les uns à côté des autres et dont personne à l'origine n'a plus qu'un autre le droit d'occuper tel endroit."

 

Emmanuel Kant, Vers la paix perpétuelle, 1795, tr. fr. Françoise Proust, GF, 1991, p. 93-94.

 

  "Le monde a mis deux cents ans à atteindre les limites d'une tendance qui le guidait depuis le début des temps modernes – tendance que Kant, l'ayant soumise à un examen philosophique, trouva, en avance, contraire à « was die Natur zur höchsten Absicht hat » (le dessein suprême de la Nature). Kant faisait remarquer que la planète que nous habitons est une sphère – et il considéra en détail les conséquences de ce fait somme toute banal. Et ces conséquences étaient que nous nous trouvons à la surface de cette sphère, que nous n'avons nul autre endroit où aller et que nous devrons donc vivre pour toujours dans le voisinage et la compagnie les uns des autres. Dès lors, « die vollkommene bürgerliche Vereinigung der Menschengattung », « l'unification parfaite de l'espèce humaine par la citoyenneté commune », est le destin qu'a choisi pour elle la Nature – l'horizon ultime de notre histoire universelle que, poussés et guidés par la raison et l'instinct de conservation, nous allons devoir poursuivre et, avec le temps, atteindre. Telle fut la découverte de Kant, mais le monde mit deux siècles de plus à en apprécier toute la justesse.   Tôt ou tard, nous prévenait Kant, il ne restera plus d'espaces vides dans lesquels pourraient s'aventurer ceux d'entre nous qui trouvaient les endroits déjà peuplés trop exigus ou trop inconfortables. Ainsi la Nature nous commande-t-elle de tenir l'hospitalité (réciproque) pour le précepte suprême qu'il nous faut – et que nous devrons au final – embrasser afin de chercher à mettre un terme la longue suite des tâtonnements, des catastrophes causées par ceux-ci, et des ruines que ces catastrophes laissent après elles. Comme Jacques Derrida devait le faire remarquer deux cents ans plus tard, les propositions de Kant montreraient facilement que les expressions aujourd'hui à la mode, comme « culture de l'hospitalité » et « éthique de l'hospitalité », ne sont que de simples tautologies : « L'hospitalité, c'est la culture même et ce n'est pas une éthique parmi d'autres... l'éthique est hospitalité. » En effet, si, comme le souhaitait Kant, l'éthique est une œuvre de la raison, l'hospitalité est – doit être ou devenir tôt ou tard – la première règle de conduite, éthiquement guidée, de l'humanité."

 

Zygmunt Bauman, La Société assiégée, 2002, tr. fr. Christophe Rosson, Hachette Littératures, Pluriel, 2007, p. 153-154.

 

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Date de création : 02/03/2023 @ 09:49
Dernière modification : 02/03/2023 @ 09:49
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