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Texte à méditer :   Le progrès consiste à rétrograder, à comprendre [...] qu'il n'y avait rien à comprendre, qu'il y avait peut-être à agir.   Paul Valéry
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Hors des sentiers battus
Qu'est-ce que le faux ?

  "Le faux se dit, d'une première manière, en tant que chose fausse, et alors est faux soit ce qui, en fait, n'est pas uni, soit ce qu'il est impossible d'unir, si l'on dit, par exemple, que la diagonale est commensurable ou que tu es assis ; l'une de ces choses est toujours fausse, l'autre peut l'être parfois, car, dans les deux cas, elles ne sont pas. – Faux se dit encore des choses qui sont réellement, mais dont la nature est d'apparaître autrement qu'elles ne sont, ou ce qu'elles ne sont pas, par exemple, une peinture en perspective, des songes : c'est bien quelque réalité, mais ce ne sont pas les objets dont ils nous donnent l'image. Ainsi on dit que les choses sont fausses, ou bien parce que, en elles-mêmes, elles n'existent pas, ou bien parce que l'apparence qui en résulte est celle d'une chose qui n'existe pas.
  Une notion fausse est celle qui, en tant que fausse, exprime ce qui n'est pas. C'est pourquoi toute notion est fausse quand elle porte sur un autre objet que celui pour lequel elle est vraie : par exemple, la notion de cercle est fausse pour le triangle. Il n'y a, en un sens, qu'une notion de chaque chose, c'est celle de sa quiddité, mais, en un autre sens, il y en une multiplicité, car il y a la chose elle-même, et la chose avec un attribut, qui sont, en quelque façon, identiques, par exemple « Socrate » et « Socrate musicien ». Mais la notion fausse n'est, au sens strict, notion de rien."

 

Aristote, Métaphysique, Livre Δ (V), tr. fr. Jules Tricot, Vrin, 2000, p. 218-219.



  "Comme la vérité consiste en l'adéquation de la chose et de l'intellect [adaequatione rei et intellectus], la fausseté consiste en leur inégalité. La chose, en effet, se rapporte à l'intellect divin et humain, comme on l'a dit. La chose se rapporte à l'intellect divin comme le mesuré au mesurant, pour ce qui, en elle, peut se dire ou trouver de positif, car tout cela provient de l'art de l'intellect divin. Mais, elle s'y rapporte, encore, comme le connu au connaissant, et ainsi, les négations et les défauts sont-ils adéquats à l'intellect divin, car Dieu connaît tout cela bien qu'il ne le cause pas. Il apparaît donc que la chose, quelle que soit sa manière d'être, existant sous quelque forme, privation ou défaut, est adéquat à l'intellect divin, et, par suite, que toute chose, dans son rapport à l'intellect divin, est vraie. C'est pourquoi Anselme dit, dans son livre De la vérité : « la vérité est dans l'essence de toutes les choses qui sont, car elles sont ce qu'elles sont dans la suprême vérité ». Ainsi, par rapport à l'intellect divin, aucune chose ne peut être dite fausse.
  Mais, dans le rapport à l'intellect humain, on trouve parfois de l'inégalité entre la chose et l'intellect, causée, d'une certaine manière, par la chose même. La chose, en effet, suscite sa connaissance en l'âme par ce qui apparaît d'elle au dehors, car notre connaissance s'origine dans le sens qui a, pour objet en soi, les qualités sensibles. C'est pourquoi il est dit, au livre I du De l'âme que « les accidents contribuent en grande partie à la connaissance de ce qu'est une chose ». Aussi, quand dans une chose, paraissent des qualités sensibles manifestant une nature qui ne les supporte pas, on dit que cette chose est fausse. Et le Philosophe, au livre IV de la Métaphysique, dit que l'on appelle fausses les choses qui « sont de nature à paraître telles qu'elles ne sont pas, ou ce qu'elles ne sont pas ». Ainsi appelle-t-on faux l'or qui manifeste extérieurement la couleur de l'or et tous ses accidents alors qu'intérieurement la nature de l'or ne les supporte pas.

  Mais une telle chose ne cause pas nécessairement la fausseté en l'âme, car la vérité et la fausseté existent avant tout dans le jugement de l'âme. Or, l'âme, en ce qu'elle juge des choses, agit bien plus qu'elle ne pâtit des choses. Ainsi une chose n'est-elle pas appelée fausse parce qu'elle susciterait toujours une appréhension fausse d'elle-même, mais parce qu'elle est de nature à le faire par ce qui paraît d'elle.
  Mais puisque, comme on l'a dit, le rapport de la chose à l'intellect divin lui est essentiel et que, par lui, elle est dite vraie, tandis que le rapport à l'intellect humain lui est accidentel et que, par lui, elle n'est pas dite absolument vraie mais comme relativement et en puissance, absolument parlant toute chose est vraie et aucune n'est fausse, tandis que relativement, à savoir dans la relation à notre intellect, certaines choses sont dites fausses."

 

Thomas d'Aquin, Sur la vérité, 1257, Article 10, tr. fr. Gilles-Jérémie Ceaucescu, CNRS éditions, 2008, p. 80-81.
 

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Date de création : 16/07/2014 @ 09:15
Dernière modification : 22/09/2014 @ 12:29
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