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Hors des sentiers battus
L'autonomie de la technique

  "La technique ne supportant aucun jugement éthique […] elle ne tolère pas d'être arrêtée pour une raison morale. Il va de soi qu'opposer des jugements de bien ou de mal à une opération jugée techniquement nécessaire est simplement absurde. Le technicien ne tient tout bonnement aucun compte de ce qui lui paraît relever de la plus haute fantaisie, et d'ailleurs nous savons à quel point la morale est relative. La découverte de la « morale de situation » est bien commode pour s'arranger de tout : comment au nom d'un bien variable, fugace, toujours à définir, viendrait-on interdire quelque chose au technicien, arrêter un progrès technique ? Ceci au moins est stable et assuré, évident. La technique se jugeant elle-même se trouve dorénavant libérée de ce qui a fait l'entrave principale à l'action de l'homme : les croyances (sacrées, spirituelles, religieuses) et la morale. La technique assure ainsi de façon théorique et systématique la liberté qu'elle avait acquise en fait. Elle n'a plus à craindre quelque limitation que ce soit puisqu'elle se situe en dehors du bien et du mal. On a prétendu longtemps qu'elle faisait partie des objets neutres, et par conséquent non soumis à la morale : c'est la situation que nous venons de décrire et le théoricien qui la situait ainsi ne faisait qu'entériner l'indépendance de fait de la technique et du technicien. Mais ce stade est déjà dépassé : la puissance et l'autonomie de la technique sont si bien assurées que maintenant, elle se transforme à son tour en juge de la morale : une proposition morale ne sera considérée comme valable pour un temps que si elle peut entrer dans le système technique, si elle s'accorde avec lui. […]
  Sauvy, grand pourfendeur d'idées reçues, clôt son livre sur la croissance, précisément par ce lieu commun : de toute façon, on n'arrête pas la technique. Il reconnaît donc que nous n'en sommes pas maître, mais bien que nous ne pouvons pas nous refuser à ce « progrès ». Autrement dit, la technique devient une valeur morale : ce qui la soutient est un bien, ce qui l'entrave est un mal. Et l'on finit par considérer comme normales les monstruosités présentées par Rorvik et Toffler pour le futur (par exemple, le fait de placer à la naissance quelques électrodes dans le cerveau du nouveau-né pour accélérer son éducation, accroître ses capacités d'assimilation, de plaisir, etc.) et celles déjà maintenant pratiquées aux Etats Unis depuis au moins 1949…"

 

Jacques Ellul, Le Système technicien, 1977, Calmann-Lévy, p. 161 et p. 165-166.


 

  "La thèse de l’autonomie de la technique est l’idée selon laquelle la technologie se développe indépendamment de tout contrôle ou décision humaine. L’évolution technologique aurait sa logique propre, ou plus métaphoriquement, une vie propre. Cette idée est associée au nom de Jacques Ellul, qui défend cette thèse dans Le système technicien. […] L’une des caractéristiques de l’évolution technologique qui permet de soutenir la thèse de l’autonomie de la technique est sa tendance à engendrer toujours plus de technologie. Ellul constate, comme d’autres, que les technologies produisent constamment des problèmes inattendus : en général la solution à ces problèmes, c’est plus de technologie et non le rejet de la technologie. De plus, la société a tendance à s’adapter à la technologie, plutôt que d’adapter la technologie à la société […] Il y a tout un marketing de la technologie qui cherche à séduire et à faire accepter la technologie par le grand public, à travers des publicités pour des produits particuliers ou une propagande générale en faveur de la technologie. […] La conception instrumentale de la technique [qui consiste à considérer la technique comme un simple moyen à notre disposition] est un leurre qui nous empêche de comprendre les systèmes technologiques modernes, et elle ne fait que servir de justification à l’état actuel et aux orientations de la technologie. […] Un individu utilise un outil dans un but précis, pour atteindre un objectif particulier. Le système technologique, en revanche […] n’est pas vraiment “utilisé”, au sens où il serait guidé vers un but particulier, par une personne particulière. […] Les artefacts que nous produisons ont souvent une complexité qui dépasse notre capacité de compréhension."


Val Dusek, Philosophy of technology. An Introduction, 2006, chap. 7 “Autonomous Technology”, p. 105-108.

 

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Date de création : 06/06/2025 @ 08:27
Dernière modification : 06/06/2025 @ 08:27
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