"Je tiens à conserver le caractère sacré de la morale, et je tiens à le conserver, non parce qu'il me paraît répondre à telle ou telle aspiration que je partage, ou que j'éprouve, mais parce qu'il m'est donné dans les faits. Du moment que le moral apparaît partout dans l'histoire comme empreint de religiosité, il est impossible qu'il se dépouille totalement de ce caractère ; autrement il cesserait d'être lui-même. Un fait ne peut perdre un de ses attributs essentiels sans changer de nature. La morale ne serait plus la morale si elle n'avait plus rien de religieux. Aussi bien, l'horreur qu'inspire le crime est de tous points comparable à celle que le sacrilège inspire aux croyants ; et le respect que nous inspire la personne humaine est bien difficile à distinguer, autrement qu'en nuances, du respect que le fidèle de toutes les religions a pour les choses qu'il regarde comme sacrées."
Émile Durkheim, Sociologie et philosophie, "Réponses aux objections", 1906, PUF, 1996, p. 101-102.
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