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Texte à méditer :  Je vois le bien, je l'approuve, et je fais le mal.  Ovide
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Hors des sentiers battus
La conception idéaliste de l'histoire

    "Ce qu'on reproche en premier lieu à la philosophie, c'est d'aborder l'histoire avec certaines pensées et de la considérer selon ces pensées. Mais la seule pensée qu'elle apporte avec elle est la simple pensée de la raison à savoir que la raison domine le monde, que par conséquent dans l'histoire universelle (Weltgeschichte) aussi les choses se sont déroulées rationnellement […].
    La réflexion philosophique n'a d'autre dessein que d'éliminer le contingent. La contingence est la même chose que la nécessité extérieure, c'est-à-dire une nécessité qui renvoie à des causes qui ne sont elles-mêmes que des circonstances extérieures. Nous devons chercher dans l'histoire une fin universelle, la fin ultime du monde, et non pas une fin particulière de l'esprit subjectif ou du sentiment (Gemüt) ; nous devons la saisir par la raison qui ne peut mettre son intérêt dans un but particulier et fini, mais seulement dans un but absolu. Ce but est un contenu qui produit témoignage de soi-même et porte témoignage pour soi-même, et qui prend appui sur tout ce que l'homme peut faire en vue de son intérêt. Le rationnel est ce qui existe en et pour soi, ce par quoi tout possède une valeur. Il se donne différentes formes ; mais en aucune il n'est clairement une fin qu'en celle sous laquelle l'esprit s'explicite et se manifeste soi-même dans les formes multiples que nous appelons les peuples. Il faut apporter à l'histoire la foi et l'idée que le monde du vouloir n'est pas livré au hasard. Que dans les événements de la vie des peuples une fin ultime soit dominante ; que la raison soit présente dans l'histoire universelle – non point la raison d'un sujet particulier, mais la raison divine, absolue – est une vérité que nous présupposons ; c'est la théorie de l'histoire elle-même qui constitue la preuve : elle est l'image et l'acte de la raison. Mais la démonstration proprement dite réside plutôt dans la connaissance de la raison elle-même ; dans l'histoire universelle elle ne fait que se montrer. L'histoire universelle n'est que le phénomène de cette raison unique ; c'est une des formes particulières dans lesquelles elle se manifeste, une copie du modèle original qui apparaît dans un élément particulier, dans les peuples […].
    Donc, de l'étude de l'histoire universelle même résulte déjà et il résultera que les choses se sont déroulées en elle rationnellement ; qu'elle a été la marche rationnelle, nécessaire de l'esprit du monde qui est la substance de l'histoire, un esprit dont la nature est une et toujours la même, et qui explicite cette nature unique qui est la sienne dans l'existence du monde (L'esprit du monde, c'est, au fond, l'esprit)".

Hegel, La Raison dans l'histoire, Introduction, 2e ébauche des Leçons sur la philosophie de l'histoire de 1830, éd. Allemande Félix Meiner (Hambourg), pp. 28-30, trad. L.-M. Morfaux.



    "Le côté négatif de ce spectacle du changement provoque notre tristesse. Il est déprimant de savoir que tant de splendeur, tant de vitalité a dû périr et que nous marchons au milieu des ruines. Le plus noble et le plus beau fut arraché par l'histoire : les passions humaines l'ont ruiné. Tout semble voué à la disparition, rien ne demeure. […]
    Après ces troublantes considérations, on se demande quelle est la fin de toutes ces réalités individuelles. Elles ne s'épuisent pas dans leurs buts particuliers. Tout doit contribuer à une œuvre. À la base de cet immense sacrifice de l'Esprit doit se trouver une fin ultime. La question est de savoir si, sous le tumulte qui règne à la surface, ne s'accomplit pas une œuvre silencieuse et secrète dans laquelle sera conservée toute la force des phénomènes. Ce qui nous gêne, c'est la grande variété, c'est le contraste de ce contenu. Nous voyons des choses opposées être vénérées comme sacrées et prétendre représenter l'intérêt de l'époque et des peuples. Ainsi naît le besoin de trouver dans l'Idée la justification d'un tel déclin. Cette considération nous conduit à la troisième catégorie, à la recherche d'une fin en soi et pour soi ultime. C'est la catégorie de la Raison elle-même, elle existe dans la conscience comme foi et toute puissance de la Raison sur le monde. La preuve sera fournie par l'étude de l'histoire elle-même. Car celle-ci n'est que l'image et l'acte de la Raison".


Hegel, La raison dans l'histoire, 1830, trad. K. Papaioannou, coll. 10-18, 1988, pp. 54-56.


Date de création : 05/12/2006 @ 14:50
Dernière modification : 05/12/2006 @ 14:56
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